3 QUESTIONS A L’AUTEUR …

 

 


 

Q. Père Philippe Plet, à la lecture de votre manuscrit, nombre de personnes s’interrogent sur votre découverte ! Est-ce une révolution  ou bien n’est-ce que l’inéluctable évolution au fil des siècles du regard chrétien et théologique sur l’Ecriture en général, sur le Nouveau Testament en particulier ?


R. Dans le domaine de la théologie, tout approfondissement significatif de la Bible est de soi une « révolution ». Pourquoi ? Parce qu’il intéresse le livre sur lequel l’Eglise fonde sa « vision du monde », c'est-à-dire la foi.

Cependant, parce qu’il se situe inéluctablement dans le prolongement de l’effort des théologiens de tous les temps, et qu’il se nourrit des lumières apportées par ce que, dans l’Eglise, nous appelons « la tradition », on peut dire qu’un tel approfondissement est aussi une « évolution ».

Au cours des 7 premiers siècles de notre ère, les Pères de l’Eglise ont scruté l’Ecriture Sainte sans se lasser, conscients qu’ils avaient beaucoup à y découvrir encore. Ils ont ainsi ouvert des voies d’interprétation aussi riches que nombreuses. Pourtant, ils n’avaient pas épuisé tout le potentiel de la Révélation ! Après le Moyen-âge, c’est un peu comme si on s’était mis à penser que les principales voies d’interprétation étaient closes … Or, il ne faut pas abandonner l’enthousiasme qui permit aux Pères de l’Eglise de découvrir toutes ces richesses cachées de la Bible. Nous devons conserver un regard neuf !




Q. Pourtant, des commentaires de l’Evangile de Jean paraissent régulièrement (livres, thèses, etc ). Ainsi votre commentaire pourrait-il n’être « qu’un commentaire de plus … ». Or, il semble que ce ne soit pas vraiment le cas, et qu’il s’agisse de tout autre chose. Alors, que recèle-t-il de si nouveau ? Et que pourriez-vous en dire à ceux qui connaissent bien le 4ème Evangile et qui en ont lu quelques commentaires parmi les plus célèbres ?


R. Ce n’est pas seulement « un commentaire de plus », il est vrai. Je ne m’écarte pourtant pas des interprétations traditionnelles de la théologie ; mais en approfondissant la structure du récit de la vie publique de Jésus, je me suis rendu compte que st Jean avait choisi 7 miracles du Christ pour nous présenter un itinéraire de l’homme vers Dieu : un véritable chemin initiatique !

Un tel constat est une grande nouveauté théologique. Les spécialistes de st Jean pensent généralement que la structure des 7 miracles (ou signes) est seulement fonctionnelle. Or, prétendre, comme je le fais, que cette structure est porteuse d’un enseignement en soi, c’est aller beaucoup plus loin que ne le fait une analyse purement narratologique. De même que le Christ aimait à user de paraboles pour obliger ses auditeurs à décrypter ses paroles, st Jean utilise ici des récits réels mais symboliques (les 7 signes), afin d’obliger le lecteur à « contempler » les œuvres de Dieu.

A ceux qui connaissent bien le quatrième évangile et les grands commentaires dont il fit l’objet, je dirai que st Jean peut nous surprendre encore. J’espère d’ailleurs que mon livre sera pour eux une invitation à aller plus loin … Pour les croyants comme pour les non croyants, il y a encore des profondeurs à découvrir dans la Bible, mais elles concernent toujours Dieu. On ne peut pas faire l’économie de Dieu …




Q. Votre commentaire, il est vrai, c’est du jamais vu. Qu’est-ce qui vous y a amené ? Quel chemin initiatique avez-vous suivi ? Avez-vous utilisé une méthodologie ou bien vous êtes-vous trouvé sous l’influence ou la lumière de l’Esprit Saint ?


R. Dans l’Eglise, nous admettons que c’est Dieu qui tout au long de l’histoire dispense à son Eglise les lumières nécessaires. Ces lumières concernent principalement l’Ecriture Sacrée (la Bible). Elles peuvent aussi concerner les « signes des temps », selon l’expression chère aux pères du concile Vatican II.

Ce qui m’a conduit à ne pas m’arrêter aux interprétations déjà connues, c’est une incontestable curiosité de type philosophique, et pas seulement religieuse. C’est le grand avantage de l’évangile de Jean (par rapport aux synoptiques) que de nous permettre d’aborder un texte religieux d’une manière philosophique, offrant à tous l’accès à la contemplation des mystères de la vie. St Jean n’est pas un moraliste ; il est un contemplatif ! Ma démarche rejoint celle de tous ceux qui sont en quête d’absolu (Bouddhistes …), qui sont à la recherche de la « sagesse » … Une sagesse que je pense trouver dans le Livre de la Révélation, c'est-à-dire la Bible !

Le chemin « initiatique » que j’ai suivi pour parvenir au but que je désirais atteindre n’est autre que la méditation de l’évangile de Jean lui-même. Je ne fais pas fi, bien sûr, des méthodes diverses qui permettent d’analyser un texte. Toutefois, celle qui répond le mieux à mon entreprise est l’exégèse dite allégorique. Pourtant, cette méthode elle-même, en fin de compte, ne serait rien sans l’intervention de l’Esprit-Saint. Le propre et le mystère d’un texte « inspiré », c’est d’éclairer l’auteur sacré lui-même bien sûr (st Jean en l’occurrence), mais également ceux qui le lisent. Tel est le fondement de l’herméneutique chrétienne, et son caractère initiatique.

Dieu bénit la curiosité de celui qui cherche à scruter les mystères humains et divins. Cette bénédiction cependant ne remplace pas l’effort contemplatif qu’exige l’approfondissement d’une « parole de Dieu ». J’ai porté en mon coeur durant des années cette certitude que les 7 signes de Jean recelaient un secret à découvrir. La perspective d’un itinéraire s’est tout d’abord imposée à moi ; ensuite, j’ai dû préciser lentement le détail de l’interprétation. D’ailleurs, cette investigation n’est pas close, et je ne pense pas avoir épuisé toute la matière du quatrième évangile. Il y a encore tant et tant de choses à y découvrir. Il suffit de penser par exemple au texte de l’Apocalypse qui continue d’attendre un commentaire qui en donne une vision simple et éclairante. Aurons-nous assez de curiosité et d’enthousiasme pour aller toujours plus loin ?